8h06. Le reveil sonne, je reussis a m’extirper de mon lit.
Dans la chambre des filles, le lit d’Erin est vide. “Eh ! Flo ! Tu sais pas quoi ??? Le lit d’Erin est vide, hehe” “Naaan ?” *air hilare*
Sur ce Flo saute sous la douche tandis que je me dirige d’un pas ensomeille vers la cuisine, objectif : Nescafe.
Ce matin on traine pas.
Parce qu’a 9h nous devons etre en socio. Au menu: expose sur le research term paper que nous avons rendu (et redige ! …) mardi.
Je ne suis pas allee jusqu’a preparer des notes, je n’ai pas de copie de mon paper. J’essaye de connecter deux neurones pour inventer un expose de 10 minutes dans ma tete, quand soudain l’un de mes arguments echappe a ma cervelle de poisson rouge. Qu’a cela ne tienne, j’ai encore 5 minutes pour allumer l’ordi et relire mon paper.
Mais ou est l’ordi ?
Pas dans le salon, pas dans la chambre…
“Flo, t’as pas vu mon ordi ?” “Nan.”
…
“Merde ! Et le mien n’est pas la non plus ! Ni mon iPod !!!”
…
*regards convergents vers la porte qui s’entrouvre toute seule*…
#interlude#
De la connerie incarnee, ou le systeme indien de fermeture de porte.
Dans notre residence, les portes sont de simples planches de contreplaques munies de 3 gonds. Pas de penne, simplement un verrou a l’exterieur, et un a l’interieur. C’est-a-dire que quand quelqu’un part et que d’autres sont a l’interieur, il est necessaire (mais suffisant) que ceux de l’interieur ferment la porte. Sinon soit elle reste ouverte (et s’entr’ouvre a cause des courants d’air) soit les autres de l’interieur sont enfermes de l’exterieur. (Vous ne suivez pas ?)
Ainsi, ce qu’il s’est passé ce matin : Erin est sortie sur les coups de 8h faire quelques courses. Je me suis levee a 8h06.
Dans l’intervalle un couillon est entre dans l’appartement et s’est servi. 2 ordis et un iPod donc, enfin grand seigneur, ladite personne a laisse a Flo son cahier d’anthropo delicatement pose sur le sofa. Quelle elegance…
S’ensuit une periode de grande colere chez Flo, et de totale apathie de mon cote. Bien sur je n’ai fait aucune sauvergarde, j’ai perdu toutes mes photos, la musique et, accessoirement les research term papers entames… Mais je ne realise pas grand chose, tout ca me passe completement au-dessus de la tete.
C’est a ce moment précis que peuvent commencer
Les aventures de Fox et Charlie – sur les traces des laptops voles.
Episode 1 : Les police stations.
Par un pur hasard (surement) l’Akanksha B est completement desert ce matin-la. Pas une madame qui nettoie le parvis de l’entrée, pas de watchman, pas de gamins qui zonent dans les parages.
Au 6eme - equivalent des chambres de bonne - un homme entre deux ages, une serviette autour des hanches : il n’a rien vu. Dans les escaliers qui menent au toit, une superposition pas croyable de boites en carton en tout genre et d’objets degueulasses qui s’entassent jusque sur la terrasse du top floor. On souleve quelques chiffons crados, mais pas de traces de laptops (en meme temps ils n’allaient pas non plus nous sauter au visage).
Au final juste le scooter de Flo eventre sur le sol… J’essaie de la calmer, ce n’est probablement qu’un hasard (encore un !).
Nous enfourchons ledit scooter, recuperons Leila au passage. Fox et Charlie ne doivent pas oublier leur premiere mission du matin : se rendre en socio et faire leur expose.
Bien sur nous arrivons avec un quart d’heure de retard - alors meme que nous etions absentes la veille pour cause (officielle) d’aller-retour a l’hopital, parce que Flo avait mal au pied après s’etre fait tomber son ordinateur dessus (du temps ou elle l’avait encore). En realite nous nous sommes rendormies et Flo n’est allee a l’hopital qu’a 17h, mais ceci est une autre histoire.
Bref bref, Fox et Charlie entrent en tourbillon en classe, ecrivent un petit mot a Sharmila. Trop gentille, elle nous fait passer en premier pour les exposes. D’un coup je me sens mal et j’ai les larmes aux yeux. Je me vois dans quelques secondes en face de cette classe qui devient une foule hostile, incarnant tous les mechants enfants de notre voisinage. Au final l’expose est expedie en 9 minutes top chrono, devant une classe redevenue une classe de socio - endormie et inoffensive.
Sur un signe de tete de Sharmila Flo et moi repartons aussi sec, sous les yeux epoustoufles de tout le monde (ils doivent probablement nous hair d’avoir reussi a echapper a deux séances sur trois de 3h d’exposes soporifiques).
En route pour la mission du matin numero 2 (qui ne s’achevera que tard dans l’apres-midi).
Nous resautons sur notre scooter, direction l’appartement. Nous interrogeons Erin (elle a croise un gamin assit sur les marches du 4eme quand elle est partie pour ses courses matinales). Interrogatoire des voisins et autres gens qui trainent dans la residence, plutot limite ceci dit car il se fait en Hindi…
Finalement, après deux clopes et un jus de pomme, nous partons pour l’Internet café raler chez Rohit. Quelques coups de fil plus tard et ses potes du slum sont sur le coup. Ils essaieront d’entendre parler de nos laptops pendant la journee et nous previendrons au cas ou…
Sur ce nous reresautons sur le scooter, direction Brahmin chowk police station, sur les conseils d’Aamanee. (Oui, tout le monde sera progressivement mis dans le coup…)
Apres quelques petits allers-retours dans DP Road, et bien sur quelques avis contradictoires, nous arrivons dans un batiment que nous croyons etre le commissariat. Mais en fait non c’est pas la, c’est en face.
Nous repartons. Soudain, un homme nous court après, “Where do you live?”. “Bhau patil Road”. Ah. Du coup ce n’est pas a cette police station que nous devons nous rendre, mais a la Khadki police station.
Fort bien, Fox et Charlie rereresautent sur le scooter.
J’abrege.
La Khadki police station est perdue au milieu de l’un des quartiers musulmans de la ville. Nous slalomons entre les gens et les vaches, les rues sont tortueuses et tres tres tres etroites, l’effervescence a son maximum : c’est un petit village dans la ville.
Au commissariat personne ne parle Anglais, nous comprenons juste qu’ici ce n’est pas le bon endroit, nous devons nous rendre ailleurs.
Quelque part sur la Mumbai-Pune highway, pres de la All-Saints Highschool…
Quand nous trouvons enfin le ‘bon’ commissariat…
# nous nous rendons compte qu’il se trouve juste derriere la maison, au bout d’Aundh Road, et qu’on a fait un fantastique detour de plusieurs bornes pour rien
# un flic nous ecoute vaguement, nous regarde, sourit, “But what can police do for you?” C’est bien ce qu’on pensait…
Au final nous insistons un peu, verdict : quelqu’un va venir avec nous. Ok, pour faire quoi ? Ben pour voir, et on prendra une decision après. Euh, et on y va comment ? Le flic “Bike. You?” “We have a scooter.” “Theek hai. Chalo then.”
Et on est partit : Rambo chausse ses Rayban, et Flo et moi rererereresautons sur le scooter…
interlude #2
Rappel : le scooter est un Kinetic des ‘80s. Aucune de nous deux n’a de permis de conduire, nous n’avons pas les papiers du scoot parce qu’ils n’existent pas (scooter vole ?), Flo est la seule a avoir un casque.
Rappel 2 : nous partons accompagne de notre escorte policiere.
/interlude #2
Apres quelques slaloms, doublages par la droite, par la gauche, contresens et franchissement de ligne blanche pour eviter les trous de Bhau patil Road, nous finissons par enfin arriver a l’Akanksha B avec le flic.
Il est 14h19, Rambo penetre enfin sur les lieux du crime…
Il monte au 5eme, jette un coup d’oeil a l’appart, aux voisins, a la configuration, analyse la situation, redescend, rechausse ses lunettes… nous rerererereresautons sur le scooter, partons faire de l’essence, nouveau contresens, et Rambo nous amene a un autre commissariat (mais combien y en a-t-il exactement ???). Celui-ci est encore plus pres de la maison, et nous sommes deja passes des milliers de fois devant…
Nous sommes amenees directement chez l’inspecteur (bureau fortdepouille) (euphemisme) qui ne parle lui-meme, a titre personnel, pas l’Anglais. Nous racontons l’histoire, notons avec un stylo qui marche pas nos noms et le reste. (Nb : A l’instant, par Francois : “Ah on a fini par vous emmener a cette police station la ?? C’est celle des agents de la circulation…”)
Autres blagues :
# l’inspecteur nous demande les receipts des ordis (ben voyons…)
# “Ah c’est en France ? Ben vous pourriez les faxer non ?”
Il faudrait deja les trouver… Puis… “Les scanner ca irait pas ?” *espoir*
*Coup d’oeil dans la piece archi nue* “Hein ? Vous voulez Internet ???”
# Flo reussi a appeler son frere, qui, après s’etre bien foutu de notre gueule, appelle mes propres parents et s’attelle lui-meme a la dure tache de retrouver le numero de serie de l’ordi de sa soeurette…
En attendant, l’inspecteur part pour son lunch break, en nous indiquant ou on peut trouver de l’eau. (?)
Au final, nous rererererereresautons sur le scooter (c’est la derniere fois) en compagnie de l’inspecteur et d’un autre policier. Direction la maison, l’inspection des lieux. Puis les flics sonnent chez nos voisins indiens pour qu’ils traduisent. L’inspecteur note nos declarations, les voisins apportent eau et chai, et le 2eme flic se contente de roupiller tranquillement sur sa chaise en plastique (il ne se reveillera que pour roter un bon coup).
Accessoirement nous frolons la catastrophe, parce que nous avions mentionnees 4 personnes a l’appart alors que nous ne sommes officiellement que trois. Du coup Lucy devient Justine, et Erin ‘juste une amie’. Comme nous ne pouvons donner d’adresse precise pour cette derniere, les soupcons du vol d’ordinateurs se portent sur elle… en attendant nous on se marre.
Finalement les policiers nous quitterons sur ce precieux conseil : “A votre place on irait au marche noir Dimanche matin tot.”
Et ce n’est pas une blague.
Pour finir, il faut quand meme mentionner que nous avons tenu Ambuj, notre connaissance utile (fils de l’Ambassadeur d’Inde au Venezuela et petit-fils du gouverneur du Kashmir) de l’incident. Resultat ?
18h36, Lucy, hurlant a titre informative depuis sa chambre : “Ambuj’s grandfather called the Army!!”
Boah, cherchez pas…